Un code de base et deux codes accessoires en français

Au Québec, trois codes gouvernent la transcription en braille du matériel didactique  destiné aux personnes aveugles aux études: (…). Ces codes ont été produits et adoptés au cours des quinze dernières années grâce à l’implication des instances éducatives du Gouvernement.

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Un code de base et deux codes accessoires en français.

 Sur la voie de la normalisation 

Au cours des quinze dernières années, le Québec s’est vigoureusement impliqué dans le dossier du braille et plus particulièrement dans celui de sa normalisation. Il a produit et adopté trois codes : Notation mathématique et scientifique en code braille Nemeth, Code de transcription de l’imprimé en braille et Code pour la notation informatique en braille.  Ces codes gouvernent la transcription en braille du matériel didactique destiné aux personnes aveugles aux études. Ils font ici l’objet d’une brève présentation.

Au début des années 1980, le Ministère de l’Éducation du Québec (MEQ) commence à financer la production de livres en braille. L’ampleur et surtout la complexité d’une telle production rendent impérieuse la normalisation.

Aiguillonné, d’une part, par les problèmes de la transcription des manuels de sciences et de mathématiques et, d’autre part, par les travaux de codification scientifique en braille réalisés aux États-Unis, le MEQ prend l’initiative, en 1981, de procéder à la traduction française et à l’adaptation de The Nemeth Braille Code for Mathematics and Science Notation. Le code intitulé Notation mathématique et scientifique en code braille Nemeth est publié en 1983 et appliqué, depuis ce temps, à la transcription et à l’enseignement Une édition révisée de ce Code sera incessamment disponible au Québec.

C’est en 1985 que le Gouvernement commence à subventionner des projets de recherche sur la normalisation du braille. Les travaux réalisés ont conduit à la publication du premier tome du Code de transcription de l’imprimé en braille en 1989 et à une nouvelle édition revue et corrigée en 1996.

Aux États-Unis, c’est à compter de 1972 que l’on travaille à la conception d’un code spécifique à la transcription en braille de documents de nature informatique. À la suite de travaux préliminaires, le Code for Computer Braille Notation paraît en 1987. Le Québec emboîte le pas et publie, en 1991, une traduction française adaptée de cet ouvrage sous le titre: Code pour la notation informatique en braille.

Nouvelle approche 

On assiste, depuis peu, à une diversification des codes dans le cadre desquels le système braille véhicule des informations de plus en plus précises et spécialisées. Pourtant ce système ne dispose que de 63 caractères distincts pour communiquer tactilement un très grand nombre de caractères visuels. Il est donc évident que chacun des caractères du système braille devient porteur de plusieurs significations. Avant d’associer à chaque caractère braille une signification spécifique, il est essentiel de distinguer le système braille de ses divers cadres d’application. Pour objectiver le décryptage des caractères, le Code de transcription de l’imprimé en braille suggère de les décrire à l’aide des points qui les constituent. À ce stade initial, le caractère est neutre. Pour qu’il sorte de la neutralité, il doit être placé dans un contexte déterminé. Il est donc essentiel de comprendre que la signification des caractères est indissociable de la nature du code dans le cadre duquel ils interviennent. Par conséquent, le caractère braille affirme ses différentes personnalités, lorsqu’il est mis au service d’une langue ou d’une discipline spécifiques.

Code de transcription de l’imprimé en braille

En langue française, le Code de transcription de l’imprimé en braille agit comme code de base ou code premier. Par code premier, on entend «le code de transcription qui fournit les règles pour le format général de l’ouvrage, (…), ainsi que la définition des symboles».[1] Autour du code premier peuvent graviter d’autres codes qualifiés de codes accessoires. Par code accessoire, on entend le code qui « intervient (…) ponctuellement  dans le cours d’une transcription pour exprimer une réalité particulière que le code premier ne peut rendre adéquatement».

Bâtir un outil de référence – pour codifier la pratique du braille au-delà des composantes fondamentales du système, – pour faire face à de nouvelles pratiques de l’imprimé, – pour cristalliser des «façons de faire» susceptibles d’apporter, dans une perspective de continuité, des solutions à des problèmes maintes fois rencontrés tant par les utilisateurs que par les transcripteurs, tels sont à la fois les buts et l’originalité de cet ouvrage.

D’une part, le Code de transcription de l’imprimé en braille fait siennes des « façons de faire » adoptées par le Code of Braille Textbook Formats and Techniques. D’autre part, il innove : placé dans le contexte spécifique de la langue française, il prend en compte, tant les abréviations spécifiques à cette langue, que les symboles et les normes typographiques qui régissent le traitement des textes en langue française dont celles de l’ AFNOR.

L’ouvrage s’articule en 10 chapitres et 10 appendices. Il présente les caractères et symboles du système braille, ainsi que leurs modalités générales d’utilisation. Il expose les normes spécifiques aux symboles du point et de la mise en évidence. Il décrit les normes de transcription des encadrés, des colonnes et des tableaux, ainsi que celles liées au format des volumes, à la pagination, à la présentation des diverses catégories de titres et au traitement des pages préliminaires.

«(…) Par sa méthodologie de présentation – description de la pratique en imprimé versus description de la pratique en braille – il constitue non seulement un outil de référence pour le transcripteur, mais aussi un outil de référence pour la personne à la fois lectrice de braille et productrice de documents en imprimé. Le Code de transcription de l’imprimé en braille peut donc servir de guide pédagogique pour apprendre à distinguer et à départager les pratiques du braille de celles de l’imprimé» [2]

Notation mathématique et scientifique en code braille Nemeth [3]

Ce Code est né du développement, par Abraham Nemeth, d’un système permettant d’exprimer les nouvelles réalités mathématiques et scientifiques de l’après-guerre. Au nombre des éléments qui le distinguent, notons : une nouvelle façon d’écrire les chiffres, l’élaboration d’un système d’indicateurs, d’une part, et de modificateurs, d’autre part.  Les indicateurs spécifient les caractères et symboles auxquels ils sont associés (indicateurs d’alphabets, de position, de direction, de formes, etc.). Les modificateurs sont utilisés, de façon générale, pour créer de nouveaux symboles. Les indicateurs et les modificateurs interviennent, en quelque sorte, comme agents multiplicateurs des significations d’un caractère braille ou d’un ensemble de caractères. Ils permettent ainsi d’exprimer en braille les expressions mathématiques, représentées dans l’imprimé par une gamme quasi illimitée de caractères, dont on peut moduler la composition.

Le contenu du code dit Nemeth s’articule autour de 25 règles thématiques (Alphabets, Fractions, Exposants et indices, Radicaux, Formes, etc.). Le corps de l’ouvrage est précédé de l’énoncé des principes de base et suivi de deux appendices et d’un index.

Code pour la notation informatique en braille 

C’est dans l’axe du code Nemeth que s’est élaboré le code informatique. La juxtaposition des codes spécialisés a été la manière américaine de relever les défis modernes du braille.

Une fois de plus, la complexité de la codification de la discipline est confrontée aux limites des 63 combinaisons de points du système braille. Par conséquent, pour représenter les 128 caractères du code ASCII, code généralisé dans la conception et la fabrication des appareils informatiques adaptés pour le braille en Amérique du Nord, il faut  multiplier la signification des caractères braille. Le code informatique, à l’instar du code Nemeth, a recours à un système spécifique d’indicateurs. L’ouvrage est organisé en 16 parties précédées d’un avant-propos et d’une introduction, et suivies de deux appendices (listes des symboles). L’adaptation québécoise ajoute au document américain une introduction et une section traitant des accents en français.

Conclusion 

La normalisation du braille est au service d’une qualité croissante de l’information et de la connaissance transmises en braille. C’est ainsi que les codes devraient être compris et appliqués. Le Québec poursuit cette voie et fait même ses premiers pas du côté du graphisme tactile.

Nicole Trudeau Ph.D.
Université du Québec à Montréal

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Références :

[1] INSTITUT NAZARETH ET LOUIS-BRAILLE (dir.) Code pour la notation informatique en braille, (traduction de Code for Computer Braille Notation, adapté par Pierre Ferland), Longueuil, 1991, p. 7.

[2] TRUDEAU, N. Code pour la transcription en braille de l’imprimé, Gouvernement du Québec, 1996, p. 1.

[3] MINISTÈRE DE L’ÉDUCATION DU QUÉBEC, Notation mathématique et scientifique en code braille Nemeth, traduction et adaptation de The Nemeth Braille Code for Mathematics and Science Notation, révision 1972, 1983.

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Abstract 

Three codes govern in Quebec the transcription into Braille of didactic material for  Blind students: Notation mathématique et scientifique en code braille Nemeth, Code de transcription de l’imprimé en braille and Code pour la notation informatique en braille.  These codes have been produced and adopted in the last fifteen years thanks to the educational authorities of the Government. 

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Article publié dans :

Les nouvelles technologies dans l’éducation des handicapés visuels / Colloque INSERM, ANPEA CNEFI / ANCE et Association Paul Guinot / Paris/Suresnes 10 et 11 juin 1996 / Nicole Trudeau Ph.D. / POSTERS: Un code de base et deux codes accessoires en français, pp. LXXX-LXXXII

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Sur des sujets apparentés :

A Basic Code and Two Accessory Codes

Code de transcription de l’imprimé en braille lancement à Paris le 1er octobre 1991.

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