La normalisation du graphisme tactile

Le projet de recherche sur le graphisme tactile se développe présentement à l’Université du Québec à Montréal. Les aspects suivants du projet sont brièvement commentés: définition, problématique, finalités, étapes de développement. Cette étude s’inscrit dans un plus vaste projet de recherche commencé en 1985, sur la normalisation du braille.

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La normalisation du graphisme tactile

Le contexte

Le projet de recherche sur le graphisme tactile se développe présentement à l’Université du Québec à Montréal grâce au soutien financier du ministère de l’Enseignement supérieur et de la science du Gouvernement du Québec. Cette étude s’inscrit dans un plus vaste projet de recherche commencé en 1985, sur la normalisation du braille. En 1989, une première étape du projet global a été franchie lors de la publication du Code de transcription de l’imprimé en braille, tome I.

Qu’est-ce que le graphisme tactile?

Par graphisme tactile il faut comprendre la représentation sur une surface (en l’occurrence sur une feuille de papier) d’une image permettant un décodage par le toucher. Implicitement, cela exige que les composantes de l’image offrent, au minimum, un relief.

Sa problématique

La normalisation du braille se fait à partir d’un système déjà fortement structuré. En fait, ce n’est pas le braille qui fait véritablement l’objet de normalisation mais plutôt le format dans lequel on doit l’insérer.

La normalisation du graphisme tactile pose un problème d’un tout autre ordre. Le système à partir duquel une image peut être tactilement décodée n’existe pas. Dès lors, des questions aussi essentielles que complexes doivent obtenir des réponses d’une objectivité plus grande que celle qui consiste à exprimer une opinion. Voici quelques-unes de ces questions:

      • De quelle importance doit être le relief?
      • Si l’on utilise simultanément plus d’un relief, de quel ordre doit être la différence entre chaque relief pour que la discrimination tactile opère de façon significative?
      • Quelle distance entre les lignes et les points permet une véritable discrimination et, par conséquent, un décodage porteur d’informations spécifiques?
      • Est-il pertinent d’exprimer tactilement le volume et la perspective? Si oui, de quelle manière?
      • Jusqu’à quel degré de complexité le décodage tactile donne-t-il accès?
      • Selon quels critères l’image visuelle doit être analysée avant d’être reproduite et plus généralement adaptée en mode tactile?

À ces questions fondamentales auxquelles la recherche n’a pas encore répondu s’ajoute une question d’ordre mécanique:

      • À partir de quel équipement les images tactiles seront-elles réalisées de façon satisfaisante et surtout significative pour les utilisateurs qui n’ont pas accès à l’image visuelle?

Ses finalités

Le projet de recherche sur la normalisation du graphisme tactile devrait conduire à:

      • L’établissement de normes pour la production du matériel graphique en mode de décodage tactile;
      • La constitution d’une banque informatisée d’éléments graphiques répondant aux normes définies.

Les étapes de son développement

Pour évoluer vers les finalités du projet, d’importantes étapes sont à parcourir successivement ou parallèlement. Il y  a:

      • L’examen et l’évaluation de l’équipement disponible pour la production du graphisme tactile;
      • Le recensement des études sur le sujet;
      • L’inventaire des types de graphiques présents dans les manuels scolaires;
      • La préparation et la réalisation des expérimentations;
      • L’élaboration des normes.

Le cadre du présent article ne permet pas de commenter chacune de ces activités, mais il offre la possibilité de mettre en lumière quelques aspects du travail.

Les résultats de l’évaluation de l’équipement disponible pour produire du matériel tactile à partir d’une gestion informatique nous ont amené à retenir l’imprimante à jet d’encre Pixelmaster comme base de recherche et d’expérimentation.

Dans le cadre des activités de validation, trois expérimentations ont été réalisées à ce jour auprès de groupes de jeunes en milieu scolaire. Toutes les expérimentations (il y en aura d’autres) visent à observer et à mesurer les réactions des sujets au matériel  tactile soumis à leur examen. Ce matériel consiste en une série de figures produites à l’aide de l’imprimante Pixelmaster. L’examen de chaque figure est piloté par une succession de questions. Chacune de ces expérimentations est encadrée par un protocole minutieux de déroulement et la sélection des participants est faite à partir de critères non moins précis.

La première expérimentation avait pour objectif de vérifier l’habileté des sujets à différencier tactilement les divers reliefs des lignes horizontales, verticales et obliques. 25 sujets ont participé à cette expérimentation. (16 filles et 9 garçons). Ils provenaient de 11 institutions  scolaires.

La deuxième expérimentation avait pour objectif de vérifier l’habileté des sujets à différencier tactilement trois formes géométriques: le cercle, le carré et le triangle équilatéral. 36 sujets ont participé à cette expérimentation. Ils provenaient de 18 institutions scolaires.

La troisième expérimentation avait pour objectif de vérifier l’habileté des sujets à différencier tactilement des textures de surface. 39 sujets ont participé à cette expérimentation. Ils provenaient de 20 institutions scolaires.

Lors de chacune de ces expérimentations, quatre régions géographiques du Québec étaient représentées.

Comme le lecteur est à même de le constater, l’approche adoptée pour le déroulement des expérimentations en est un de validation progressive de paramètres de base du décodage tactile dans des contextes graphiques délimités. Cette façon de faire nous a fourni, à ce jour, une somme déjà très considérable de données sur lesquelles nous nous penchons présentement afin de les bien comprendre et interpréter. Si les résultats de la première expérimentation ont déjà fait l’objet d’une publication, il devrait en être ainsi pour la deuxième et la troisième expérimentation dans un proche avenir.

Si nous continuons à travailler avec l’imprimante à jet d’encre solide Pixelmaster dans le cadre de notre démarche de validation c’est que, entre autres, le matériel « parle » aux participants et dans de nombreux cas, de façon extrêmement éloquente et convaincante.

L’immensité de la tâche

Le projet de recherche sur la normalisation du graphisme tactile est un projet de nature empirique. Il doit permettre de mettre à la disposition des utilisateurs du matériel graphique tactile de qualité au niveau de la lisibilité des symboles, de la clarté du format, de la précision de l’information communiquée et de la standardisation de la production. Mais, des besoins pressants de recherche dans les domaine de la psychologie, de l’éducation, de la cartographie, de l’ingénierie, des sciences informatiques, etc. sont ressentis pour établir des bases solides, pour disposer de systèmes de références, pour ancrer des méthodologies de présentation et de la lecture de l’image tactile et pour élaborer des pédagogies nécessaires à la formation des lecteurs et des producteurs.

Pour de plus amples informations sur le sujet, voir :

TRUDEAU, Nicole et DUBUISSON, Colette (1991) / Tactile Graphics in Braille Texts / Conference Proceedings, World Congress on Technology / Decembre 1-5 1991 / Arlington, Virginia. vol. 4 pp. 382-400.

MURPHY, Paul (1989) / The Microcomputer and Tactile Graphics / Closing the Gap, 8, 3, pp. 14-15, 36-37.

Nicole Trudeau Ph.D.
Agente de recherche Université du Québec à Montréal.

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Article publié dans:

Le curseur Le journal d’information de Visuaide 2000 / Février 1993 vol. 1 no 3, édition en braille pp. 2-8 / Nicole Trudeau Ph.D. / La normalisation du graphisme tactile.

(La publication en imprimé n’a pu être retracée).

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Sur des sujets apparentés :

Tactile Graphics in Braille Texts

Tactile Graphics in Braille Texts (en français)

Vers la normalisation du graphisme tactile

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