Prendre le temps de réfléchir

27 décembre 2021

La section Idées du devoir du 24 décembre nous soumet des articles qui dépassent le quotidien et qui invitent à prendre le temps de réfléchir au delà de la simple lecture du journal.

J’attire votre attention sur quelques-uns d’entre eux. La souffrance, la foi et la vie signé Sam Haroun, enseignant et auteur.

La table est ainsi mise :

«La pandémie nous a réappris la souffrance. Nous avions oublié qu’au commencement était la souffrance, que de l’enfantement au trépas, la vie est jalonnée de deuils, d’échecs, d’amitiés brisées, de promesses perdues. Nous avions confondu bonheur et bien-être matériel, et le coronavirus nous a rappelé que toutes les richesses et tous les honneurs ne valent rien contre l’infinitésimal ennemi. Nous mesurons aujourd’hui la dimension du drame qui nous afflige et qui nous renvoie à nos limites et à nos faiblesses. Nous mesurons surtout notre solitude: face à la mort, c’est-à-dire face à l’éternité — qu’on y croie ou qu’on n’y croie pas —, l’être humain est seul parce qu’il est conscient qu’il va mourir un jour. De là son insaisissable angoisse: l’heure venue, nous nous séparerons de la vie qui est en nous, de ce frémissement de l’âme qui nous met en correspondance avec le monde des vivants. C’est la souffrance originelle et l’ultime souffrance.»

«La souffrance sans la foi n’est que désespérance (…) «on peut vivre sans la religion à condition d’avoir la foi. Celle-ci n’est pas que religieuse: par ces temps de pandémie, il y a plus de foi et d’amour dans les soins prodigués à un enfant malade que dans toute activité humaine. Il n’est pas nécessaire que la foi soit religieuse pour répondre à la quête de l’homme: ? Il y a des athées qui trouvent leur salut dans la raison, la science ou l’art; (…) L’important est que la foi (…) débouche sur la vie. (…) Que la foi en l’homme puise dans la vie, elle devient création et fécondité, et elle produit Michel-Ange, Montaigne et Mozart. (…) l’art, la science et la culture demeurent ce que l’homme a fait de meilleur et qui le perpétue dans le temps: l’humanisme appartient à tous les hommes, il réconcilie les impossibles parce qu’en lui souffle l’esprit.»

«La conquête de la liberté comme la liberté, l’humanisme naît dans la souffrance, vit de tensions et se perd en complaisances. (…) Notre humanisme est tragique parce qu’il est fragile (..)»

«Confrontés à l’échec, à la maladie et à la mort, nous livrons un combat que nous n’avons pas le droit de perdre: la vie en est l’enjeu, telle est la finalité de la foi, qu’elle soit d’inspiration humaine ou divine.»

«Si Noël a un sens, c’est celui de la fraternité humaine (…)»

«La pandémie nous a réappris la souffrance, mais les milliers d’hommes et de femmes qui soignent nos malades nous ont réappris l’espérance. (…)

Source :

Sam AROUN / La souffrance, la foi et la vie / Le Devoir / Section IDÉES / 24 décembre 2021

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La générosité, c’est très bien, la solidarité, c’est encore mieux signé Yvonne Langford sur un fond de tragédie haïtienne, l’auteure réfléchit sur la distinction entre générosité et solidarité. Elle se réfère aux définitions du philosophe André Compte-Sponville.

«La générosité, dit Comte-Sponville, c’est la vertu du don, c’est prendre en compte les intérêts de l’autre et lui faire du bien de manière désintéressée, sans chercher à se faire du bien à soi-même. (…) Fondamentalement, le généreux donne parce qu’il est sensible au besoin de l’autre. (…) la générosité est moralement louable. Mais elle ne suffit pas pour bâtir un monde plus juste.»

«La solidarité, c’est différent. Agir de manière solidaire, c’est prendre en compte les intérêts de l’autre, oui, mais pourvu qu’ils soient partagés avec les miens. C’est donc se reconnaître un intérêt commun avec les autres et se faire du bien mutuellement, ensemble, de manière intelligente et organisée.»

«Comme Québécois et Canadiens, on le sait d’expérience: le véritable progrès socioéconomique va dans le sens de la solidarité, pas du «chacun pour soi». Sur le plan mondial, il semble beaucoup plus difficile d’agir sur la foi de nos intérêts convergents, en premier lieu faute de les reconnaître. Pourtant, la plupart des défis mondiaux auxquels nous sommes confrontés passent par là. (…)  on le sait pourtant: si les habitants de cette planète viennent un jour à bout de la crise climatique, c’est qu’ils auront enfin compris leur intérêt à agir solidairement. Sur le plan sanitaire, si on y réfléchit un peu, on se rend vite compte qu’on viendra plus rapidement et plus efficacement à bout de la pandémie qui nous afflige si on agit solidairement avec les autres pays du monde. Qu’on se le dise: le Canada n’offre pas des vaccins aux pays défavorisés par pure générosité, mais parce que c’est notre intérêt d’empêcher l’émergence de variants comme Omicron dans les différents coins du monde. Sur le plan du développement humain, malheureusement, le progrès s’annonce beaucoup plus difficile, (…)»

«(…) la solidarité se révèle beaucoup plus efficace que la générosité pour bâtir un monde plus juste (…). C’est la solidarité, et pas la générosité, qui nous fait avancer socialement et économiquement. C’est pourquoi elle est indispensable.»

«En agissant dans l’intérêt des autres, on agit en même temps dans son propre intérêt.»

Source :

Yvonne Langford / La générosité, c’est très bien, la solidarité, c’est encore mieux / Le Devoir / Section IDÉES / 24 décembre 2021

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S’ajoutent entre autres à cette section Idées:

Vive Noêl, fête païenne! de Jean-François Lisée

Noël ou l’histoire hors de ses gonds de Jean-Claude Ravet

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