Pierre Morency, le poète

10 avril 2020

En 2004, les Éditions du Boréal rassemblent en un même ouvrage huit recueils de poèmes de Pierre Morency parus initialement entre 1966 et 1986:

Poèmes de la froide merveille de vivre (1967)
Poèmes de la vie déliée (1968)
Au nord constamment de l’amour (1970)
Les appels anonymes (poème affichable) (1970)
Lieu de naissance (1973)
Torrentiel (1988)
Douze jours dans une nuit (1985)
Effets personnels (1986)

Jusqu’ici, j’ai fréquenté sa prose imagée et touchante que j’aime beaucoup. La lecture de sa poésie m’impose un rythme de lecture et de relecture fort différent.

«Vous tenez entre vos mains un livre d’amour» (p. 7) déclare d’entrée de jeu Pierre Morency .

«Pourquoi avons-nous si peur du mot poésie alors que c’est le mot amour qui devrait nous faire trembler?» (p. 7)

«Tout ce tient», affirme-t-il.

Il l’explique:

«Voilà la raison pour laquelle je n’ai jamais tracé de bien larges démarcations entre mes poèmes et mes livres en prose. Contrairement à l’opinion commune, il y a de la pensée dans les poèmes et aussi toute la gamme des vibrations émotives dans une prose qui se veut densément expressive, (…)» (pp. 7-8)

Il confie qu’il n’a jamais oublié (…) ce conseil que Baudelaire se donnait à lui-même:

«Soit toujours poète, même en prose». (p. 8)

Ce que je connais de la prose de Pierre Morency me convainc qu’il a fait sien cet objectif.

Dans le but avoué de vous mettre sur la piste des poèmes de Pierre Morency, je cueille quelques pétales de ses bouquets pour vous permettre de les regarder, de les goûter, de les sentir, de les ressentir, d’être touché par quelques éclats de son âme.

C’est ici que je me trouve et que vous êtes dans Lieu de naissance

«C’est ici que je me trouve et que vous êtes
c’est sur cette page
où je suis plus moi que dans la peau de l’ours
(…)

ici et pas ailleurs qu’on file comme la flèche
(…)

le nord n’est pas dans la boussole il est ici

le désarroi des têtes n’est pas dans la foule
(…)

le plus vrai de la ville n’est pas dans la ville
il est ici pas ailleurs
et c’est sur cette feuille que je nais
et c’est sur cette feuille qu’on me meurt
(…) » (p. 163)

Notre campagne à l’hospice dans Lieu de naissance

«Ce jour où je battrai ma campagne, on me versera dans l’air chancelant d’un hospice. Mon rouleau aura perdu le fil, je serai devenu le petit garçon de jadis. (…) je serai visité par un grand amour, (…) je courtiserai une veuve épanouie (…). Je courtiserai une femme à bout d’âge qui aura des écailles autour des yeux comme pour voir au fond de la mer. (…)

L’après-midi parfois nous marcherons jusqu’aux cavernes et nous nous glisseront dans des couloirs sans fond. Nous serons inséparables, (…)

Un matin sec du mois de janvier, on viendra,(…) Puis, on me descendra dans le coffre où elle reposera déjà. Là, nous nous empoignerons. Nous ne seront plus des vieillards, nous serons un couple de jeunes défunts.»1 (p. 178)

Au centre de notre vie je gravite non encore né non encore formé
dans Au nord constamment de l’amour

«Un jour j’aurai des mains
le même jour je commencerai d’avoir un coeur
mon amour aura des mains
pour te donner ce que je suis
mon amour aura des mains (…) »

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https://www.lesvoixdelapoesie.com/poemes/au-centre-de-notre-vie-je-gravite-non-encore-ne-non-encore-forme

Mais, à mon corps défendant, je n’ai pas la même qualité de lien avec les poèmes de Pierre Morency. Sa prose me rejoint bien davantage.

NOTE:

MORENCY, Pierre / Poèmes 1966-1986 Morceaux choisis / Montréal / Les éditions du Boréal / 2004 / 275 pages

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