22 avril 2020
Le mot aîné devient un problème dont les autorités publiques doivent aussi se préoccuper, comme si elles n’en n’avaient pas suffisamment sur les bras et dans la tête.
Quel est le sens premier du mot aîné ?
«Personne plus âgée que telle autre.»
Donc, le terme est un comparatif, comme celui de vieux, d’ailleurs. C’est simple. C’est clair. C’est factuel. Ce n’est pas un défaut d‘être aîné ou même vieux, ce n’est pas une tare, c’est une réalité biologique.
Mais pourquoi irrite-t-il tant ce mot aîné qui s’est d’ailleurs substitué à vieux ? Probablement parce qu’il nous rappelle que nous sommes avancés dans notre parcours de vie; parce qu’il nous dit aussi que le nombre d’années vécues est supérieur à celles qui se profilent; parce qu’on trouve insupportable de se faire répéter cette réalité à laquelle nous évitons de penser, à laquelle nous ne voulons pas croire et à laquelle nous n’avons pas encore viscéralement consenti.
Mais qu’est-ce que le mot choisi change à notre condition de vieux, d’aîné, d’âgé ou de sage ? Ce n’est pas le terme qui est impropre mais le sens et l’interprétation que nous lui attribuons et qui pèse lourd positivement ou négativement sur les épaules et le coeur. Même si on nous appelait les anciens jeunes ou les moins jeunes, serions-nous plus rassurés et plus réconfortés ?
Bien sûr, toutes généralisations et catégorisations ignorent les nuances et les différences, elles les gomment même. Nous savons et devrions admettre cela. Tous les vieux ne sont pas malades, ni en fin de vie immédiate, ni en situation de grande dépendance. Mais, ils sont biologiquement plus fragiles, est-il démontré. Ce n’est pas parce que ça nous blesse ou nous heurte que c’est faux.
À 60 ans, on est tout de même pas au début de notre vie; l’usure continue de faire son oeuvre, que ça nous déplaise ou non de l’entendre.
Notre date de naissance ne se modifie pas et la réalité qui nous caractérise non plus. On peut changer de coiffure ou de couleur de cheveux, mais pas de génération. Vieux ou aînés nous sommes et nous devrions nous reconnaître. Nous préférerions sages en croyant que nous le sommes à partir de 60 ans? Une autre généralisation plus plaisante mais pas nécessairement plus vraie!
Pourquoi encombrer le discours public avec la terminologie? Il me semble évident que les priorités sont ailleurs. Si nous nous sentons ni vieux ni aînés ni sages, pourquoi sommes-nous vexés par l’emploi de ces termes? Nous n’avons qu’à nous définir ou qualifier nous-mêmes.
Personnellement, je ne suis plus vexée de me faire dire vieille et aînée, je suis un peu agacée de me le faire rappeler quotidiennement. Mais, au fond, on me présente un miroir qui ne ment pas.
Je suis en forme et active et j’espère le demeurer. J’ai la chance de n’être pas dans un CHSLD. Mais, je suis vieille de par ma date de naissance, quelle que soit l’Étiquette qu’on m’accole; je suis biologiquement plus exposée et fragile face à l’ogre. Si on me répétait que le virus n’est pas menaçant pour moi, je continuerais de vivre comme avant et il se sentirait invité à me visiter.
Quelquefois j’ai le curieux sentiment que les autorités publiques veulent davantage notre bien que nous-mêmes tellement nous désirons fuir cette dure réalité. Faisons preuve d’adaptabilité et de maturité. Ne jouons pas sur les mots ni avec le feu.
Que les vieux en particulier soient « tannés » du confinement, cela change-t-il quelque chose à la contagiosité du virus? Va-t-il comprendre notre impatience, notre intolérance et notre exaspération ? Va-t-il aller voir ailleurs ? C’est déjà fait. Il est allé voir ailleurs avant de nous envahir même si nous ne l’avons pas redouté, et il continuera de se répandre avant de s‘épuiser.
On demandait récemment à David Saint Jacques quelques conseils pour nous aider à vivre le confinement. L’une de ses réponses allait dans ce sens: Pensons à la raison pour laquelle nous sommes confinés. Sage réflexion. En prenant sens, une situation devient plus vivable.
On ne peut tout de même pas croire que les autorités prennent plaisir à nous contrarier. Je les remercie de nous conscientiser avec acharnement et de nous responsabiliser. À nous d’en faire une bonne lecture et surtout une sage concrétisation.
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La vieillesse – Ce qu’en dit wikipédia
« La vieillesse est l’âge ultime de l’être humain qui succède à l’âge mûr, appelé aussi «troisième âge» (on nomme parfois quatrième âge le moment où l’état de vieillesse entraîne une situation de dépendance). (…)»
«(…) le vieillissement reste un phénomène progressif, il n’y a donc pas réellement d’âge biologique fixe correspondant à la vieillesse. Dans les sociétés occidentales contemporaines, des expressions telles que seniors, aînés ou personnes âgées remplacent de plus en plus celles de vieux ou vieillards, jugées péjoratives. (…) »
«La vieillesse répond aujourd’hui principalement à des injonctions sociales et médiatiques.»
«En d’autres mots, la vieillesse est une construction sociale»
«Quant aux représentations médiatiques, les aînés sont généralement présentés comme un groupe assez homogène et dépendant des savoirs et des ressources des personnes plus jeunes».
«L’effet de ces discours et représentations est de perpétuer l’âgisme, soit une forme d’exclusion sociale».