L’enfer

20 février 2020

Dès les premières pages, L’enfer de Sylvie Drapeau transpire la sensibilité à fleur de peau en nous plongeant au coeur de son drame familial.

 Ce troisième roman d’une série de quatre1 porte bien son nom: L’enfer.

Un frère adoré, amoureux de sa mère et en conflit avec son père, sombre dans la maladie mentale à la suite, entre autres, de la mort de la mère et, peut-être, de la noyade de son frère aîné..2

Le drame familial nous est dit avec une vibration, une émotivité aux milles couleurs et états d’âme. C’est une âme encore souffrante qui raconte, qui revit, qui se questionne, qui se confie, qui pleure, qui crie, qui se révolte, qui se désespère de ne pas sauver ce frère, qui voudrait faire plus et mieux. Elle s’adresse directement à Richard, à son père, à ses soeurs.

La relation fraternelle est d‘autant plus engageante que la forme d’écriture adoptée est celle de la confidence: Sylvie parle directement à Richard au-delà de sa mort. Elle lui explique comment elle a vécu sa descente en enfer, comment elle a voulu l’aider, combien elle s’est inquiétée, jusqu’où elle a essayé de le protéger, de le retenir, à quel point elle s’est investie, mais aussi culpabilisée.

«Les médicaments réussiraient parfois à te cacher le feu, mais à l’intérieur, il poursuivrait sa dévastation brûlante et ce serait de la lave qui coulerait désormais dans tes veines.» (p. 53)

Le livre s’ouvre sur un rêve que Sylvie raconte à Richard, son frère qui s’est suicidé. Elle fait revivre ses derniers moments.

Et le live se termine sur un lâcher prise:

«C’est ainsi mon frère, qu’ensemble, les yeux pleins de larmes, nous avons consensi, enfin, à te laisser partir.» (…) Mon bébé pleure, (…) me ramenant au présent de cette nouvelle vie, sans toi, (…) Mes larmes éclaboussent son si doux visage. Il me regarde et me sourit (…) Comprend-il quelque chose que je ne sais pas voir encore? (…) Apprends-moi? (…)» (p. 95)

C’est avec le sourire du bébé, de son bébé, que l’auteur sort de l’enfer après nous avoir plongés dans son expérience si douloureusee si interpelante.

Des pages touchantes, bouleversantes, authentiques.

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1 DRAPEAU, Sylvie / Le fleuve (2015), Le ciel (2017), L’enfer (2018), La terre (2019) / Montréal, Leméac

2 Voir Le fleuve.

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