Émouvant d’un couvert à l’autre

17 avril 2024

Victoire, ce court roman de Michel Tremblay, nous plonge dans un univers d’émotions dès les premières pages et qui ne se dément pas tout au long de la lecture. C’est l’histoire de la jeune Victoire et de son frère Josaphat.

Après avoir traversé les Chroniques du Plateau Mont-Royal, cette lecture leur donne une perspective et une profondeur bouleversantes en une centaine de pages. La nature, les relations fraternelles et sociales, la religion, tissent une trame éloquente et captivante.

Ce texte nous offre, comme il est noté en Quatrième de couverture,

«(…) un moment d’écriture de très haute intensité, transporté par la musique endiablée de l’interdit.»

La musique, le violon de Josaphat, y joue un rôle puissant et bouleversant.

«Ce qui est alors monté dans le ciel des Laurentides était la plainte la plus déchirante que j’avais jamais entendue. Un sanglot musical, un chant d’amour désespéré, une crise de larmes comme on en fait qu’en rêve, alors qu’on a la bouche grande ouverte pour laisser passer des hurlements de souffrance qui refusent de sortir de nous et nous plient en deux de douleur. Une douleur, oui, c’est ça, une douleur immense a éclaté dans le noir, traduite en une mélopée lancinante, lente et profonde. C’était à la fois magnifique et terrifiant. La mélodie était belle mais faisait mal. (…)». (p. 116)

Le roman se termine par un épilogue poétique (pp.127-131) dont voici quelques lignes :

«Après la répétition des deux premières notes, une mélodie d’une étonnante douceur, une sorte de souffrance retenue, lente, envoûtante, s’est mise à tourner autour de nous, comme si elle prenait son temps avant de s’envoler puis, au moment où le sommet de la montagne est devenu d’un blanc éclatant, elle a pris de la rapidité, comme rendue folle. C’étaient les mêmes notes, la même mélodie, mais partie en vrille, saisie d’une folie incontrôlable, un tournoiement continu qui sautillait de plus en plus vite avant de se propulser vers la lumière. La mélopée était devenue une gigue, un rigodon, (…) Et C’est là, porté par la plus belle musique jamais entendue, que l’enfantement se produisit. Un arc lumineux d’un rouge vif, un début de tache de sang, est apparu derrière les arbres du faîte de la montagne qui semblait lui donner naissance. Plus qu’une boule de feu, une gigantesque perle rouge est née sous mes yeux, propulsée par une force colossale du flanc de la montagne vers les grandes hauteurs du firmament, elle a grimpé, majestueuse, en avalant les quelques étoiles qui perçaient encore le ciel, porté par le son d’un violon magique et la voix d’un mage. (…)». (p. 130)

C’est évident, ce roman m’a totalement séduite.

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Source :

TREMBLAY, Michel / Victoire / Roman élégiaque / Leméac / Actes Sud / Montréal / Arles / 131 pages

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